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HISTOIRE GÉNÉRALE DE L’AFRIQUE POUR LA SEMAINE DE LA LIBÉRATION DE L’AFRIQUE
Épisode 21 : Un philosophe africain au siècle des lumières : Amo Le Guinéen, son œuvre
Amo Guinea Afer, le nom de ce philosophe est un nom qu’il prend en 1728-1729. Nous sommes tout à fait au début du siècle qu’on va appeler le siècle des Lumières mais qui a été aussi le siècle des ténèbres parce que c’est le siècle pendant lequel la traite des esclaves, comme on dit, a pris une ampleur inégalée dans le passé. On commence à discuter de la légitimité de la traite et de l’esclavage mais on n’en discute pas véritablement. C’est à partir des années 1750 que le débat prend véritablement forme. Ce jeune philosophe, qui est passé de main en main depuis sa Gold Coast natale jusqu’en Allemagne, décide finalement, au milieu d’études très variées, de devenir philosophe. Philosophe, juriste, théologien. Et la première thèse qu’il fait, une thèse qui est en latin, comme c’était d’usage à l’époque, une thèse pour laquelle il cite son nouveau nom : Amo Guinea Afer, Amo Africain de Guinée. Le titre français de cette thèse en latin est : Thèse d’Amo Guinea Afer : « Du droit des Noirs en Europe ». C’est tout un programme parce que dans l’Europe de l’époque, tout noir était supposé être esclave et Amo plaide pour montrer qu’il n’y a aucune raison dans ces États civilisés dans lesquels, depuis la fin du Moyen-Âge, il était dit qu’aucun homme dans aucun État européen ne peut être privé de sa liberté. Amo plaide donc en disant : « Les Africains sont des hommes comme d’autres en Europe, ils doivent jouir des mêmes droits que les Européens ». Nous sommes en 1729. Ce débat sera repris par les philosophes, les philosophes français, les philosophes anglais et l’on voit à l’approche de la révolution dans les années 1770, cette chose étonnante que les noirs, de plus en plus nombreux, que leurs maîtres ramenaient des Amériques pour les servir en Europe, et bien ils se mettent à intenter des procès à leurs maîtres. Procès qu’ils gagnent. Ils les gagnent en Angleterre et en France. Évidemment, cela nous oblige à revoir un tout petit peu notre histoire de l’Europe. Ce ne sont pas d’abord les philosophes qui ont plaidé pour la liberté des Africains. Ce sont les Africains eux-mêmes qui ont plaidé pour leur liberté et qui l’ont emporté avant les abolitions. Voilà pourquoi Amo le Guinéen apparaît comme le tout premier des philosophes politiques du continent africain.